Lorsque Marc Leroy (1) rejoignit le Conservatoire en 1999, cet ancien officier pilote de l'Armée de l'Air et actuellement Commandant de bord à la compagnie Air France , se posa une question simple : « Comment puis-je aider le CAEA ? ».
Constatant que l'Armée de l'Air et Dassault était des partenaires privilégiés, il proposa au conseil d'administration d'ajouter une compagnie d'aviation commerciale française, au carnet des relations du Conservatoire. Pour cela, il suggéra de créer une salle dédiée, à Air France. Après le feu vert du CAEA, il obtint l'accord de Denis Parenteau Président du Musée Air France et de François Brousse, Directeur de la communication de la compagnie, par l'intermédiaire de Brigitte Lenozer, responsable du Patrimoine à Air France.
La vie et surtout la vie d'un pilote est faite de rencontres par hasard ! Marc venait d'atteindre les 15 000 heures de vol et, jusqu'à un passé récent, la compagnie offrait une médaille à ses pilotes pour marquer cette étape. Les temps changeant, les navigants doivent maintenant se l'acheter !. Le hasard, lui fit rencontrer Jean-Pierre Macaigne, fils de Jean Macaigne qui participa à l'épopée de l'Aéropostale comme radio-navigant (2), accompagnant dans leur vols, des hommes de légende, comme Mermoz, Saint Ex., Reine, Guillaumet et d'autres pionniers. « Nous nous sommes liés d'amitié et Jean-Pierre m'a confié la médaille des 15 000 heures de son père et le chrono que lui remit Didier Daurat, à la condition que je les porte en vol… ». « Je lui ai répondu, d'accord mais, comme je porte déjà le chrono de mon père, je ne mettrai celui du votre que lors des traversées de l'Atlantique sud. »
Et Marc Leroy de préciser : « C'est-ce que je fais depuis : lorsque je pars pour Buenos Aires ou Santiago du Chili, aux commandes d'un Airbus hier et aujourd'hui d'un Boeing 777, j'épingle la médaille sur ma cravate d'uniforme et le chrono est à mon poignet. »
C'est ainsi que tout naturellement, Marc proposa à Jean-Pierre Macaigne de dédier la salle du conservatoire à son père, ce qu'il accepta avec enthousiasme. La future salle consacrée à l'aviation commerciale française avait trouvé son nom définitif : « Salle Air France - Jean Macaigne ». Et le CAEA mit à disposition de Marc Leroy un local d'une quarantaine de mètres carrés, pour mettre en œuvre son projet.
L'activité professionnelle de Marc ne lui permettait pas de disposer de temps suffisant pour l'entreprendre seul : un renfort s'imposait… et de nouveau le hasard !
Guy Lassalmonie (1), ancien technicien aéronautique, venait d'adhérer au Conservatoire et Pierre Pée, vice-président, lui proposa, comme premier travail, d'aider Marc Leroy dans la remise en état du local. « Remise en état est bien le mot ! » dit Guy, « La peinture grise des murs tombait par plaques. Durant une bonne année, avec Marc, j'ai nettoyé, rebouché environ quatre cents trous de chevilles, attaqué la peinture… Le plus difficile a été de construire de toute pièces les vitrines en bois et …j'ai horreur de travailler le bois » et Guy Lassamonie de rajouter avec humour :« En plus, j'en ai fait six ! ». Ce technicien, spécialiste des bancs d'essai, à la carrière aéronautique bien remplie, était loin de s'attendre à se trouver à pareille fête dans l'art du bricolage en entrant au Conservatoire. Cependant, grâce à ce travail partagé, une « équipe » se constituait avec Marc et se poursuivit, par la suite, avec la restauration du Wassmer CE 43 Guépard. (1)
Les panneaux rappelant l'aventure des compagnies aérienne françaises, gracieusement offerts par le Patrimoine Air France et Brigitte Lenozer, furent accrochés aux murs.
Guy et Marc décidèrent de privilégier l'aventure humaine dans les futures expositions et divisèrent la salle en quatre époques : 1900-1932, 1933 (date de la création d'Air France)-1939, 1940- 1969, et 1970 à nos jours. A chaque période, correspond la mise en avant d'un avion mythique. Les deux hommes se lancèrent dans les recherches d'équipements, de matériels, de documents et de témoignages divers.
Guy Lassalmonie apporta des pièces et la documentation d'époque concernant le DC 3 et d'autres documents techniques, photographiques et appareillages de son avion « chéri» : le Mercure. Autour des panneaux Air France, Marc enrichissait vitrines et murs, de photos et objets provenant de la famille Macaigne ou de sa collection personnelle, allant jusqu'à faire rebroder des ailes de poitrine de radio afin de présenter sur un mannequin, l'uniforme de Jean Macaigne lorsqu'il était navigant à Air France.
Parmi les pièces rares confiées par Jean-Pierre Macaigne, Marc Leroy présente aux visiteurs la montre de marque Aéra qui se trouvait fixée sur la planche de bord du Laté 26-2 immatriculé F-AILB, quand il capota en août 1930 au sud du Brésil, dans un lieu perdu : le Lagoa dos Patos, avec aux commandes Raoul Mac Léod et son radio…. Jean Macaigne. Tous deux sortis indemnes.
On imagine, soixante dix sept ans plus tard, l'émotion des fils du pilote et du radio de cet avion de l'aéropostale détruit, réunis côte à côte, le 28 juin 2007 lorsqu'ils coupèrent le ruban symbolisant l'ouverture de la salle « Air France-Jean Macaigne » du CAEA.
Pour Guillaume, petit fils de Jean, ce jour fut aussi l'occasion de découvrir, au plus près, la contribution de son grand père à une épopée unique de notre histoire moderne.
(1) Cf : L'atelier Wassmer CE 43 Guépard
(2) Jean Macaigne était radio à l'aéropostale de 1929 à 1932, devenue Air France en 1933. Il termina sa vie professionnelle en 1960 dans la même compagnie avec 24 000 heures de vol.
Cf :LMSV2005