« Plus on récupère de documentation, plus on se passionne » c’est en partant de cette constatation que Gilles Coustellié a subitement pris une décision : « Il me faut une salle ». Oui ! Une salle au sein du Conservatoire et arrêter de trimbaler les panneaux d‘exposition : une année aux journées du Patrimoine, une autre à la base sous-marine ou encore à la Maison des Associations de Mérignac.
Au départ, Gilles s’intéressait à l’histoire de la base aérienne de Mérignac, c’est en effectuant ses recherches qu’il découvrit l’histoire des Groupes Lourds. Après plus de 10 années de collecte, les documents et objets liés à leur aventure devenaient encombrants et de moins en moins manipulables. Gilles Coustellié contacta le bureau du Conservatoire de l’Air et de L’Espace dont il était membre et le Chef du cabinet du Commandant de la Base de Mérignac. Tous approuvèrent sa démarche de créer au sein du CAEA, une salle exposition dédiée à ces 2 groupes de bombardiers lourds qui s’illustrèrent durant la seconde Guerre Mondiale de 1943 à 1945 et de la baptiser « Guyenne et Tunisie».
Le lien avec la base militaire de Mérignac s’imposait : c’est là que les groupes « Guyenne » et « Tunisie » anciens squadrons 346 et 347 du Bomber Command de la Royal Air Force, à équipages français, furent affectés après la guerre. Gilles, passionné par l’histoire de ces combattants et aidé par son imagination s‘envola dans ses rêves…Il venait de trouver le moyen de concilier ceux de son enfance et son intérêt pour la grande aventure des hommes mêlés aux fureurs de l’histoire.
Dès l’âge de 7 ans, accompagnant son père aux meetings aériens, il commença à confectionner ses premières maquettes d’avion en plastique avec une certitude : « Je serai pilote de chasse ». La nature ne l’ayant pas pourvu des yeux de lynx indispensables pour être sélectionné dans ce métier, il s’orienta quand même dans l’Armée de l’Air, là où il serait « au plus proche des avions ».
Parallèlement, son intérêt pour l’histoire aérienne et plus particulièrement celle écrite durant la 2 ème Guerre Mondiale, forçait son admiration par les exploits et sacrifices de ces hommes fiers de faire leur devoir pour leur pays, sans savoir s’ils auraient un lendemain. C’est ainsi, qu’il avança, de découvertes en découvertes, plongé dans les archives des groupes « Guyenne » et « Tunisie » et conforté par des documents confiés par André Hautot, ( à l’époque le plus jeune des membres d’équipages, engagé à l’âge de 17 ans en 1943 ). Basés dans le Yorkshire à Elvington, ce groupe de Français venant d’Afrique du Nord combattaient à bord de quadrimoteurs lourds Handley Page Halifax à moteurs Bristol Hercules.
A l’inverse de la solitude d’un pilote de chasse dans sa machine, Gilles Coustellié s’est intéressé à la communauté des équipages de bombardiers lourds. Trop souvent les infortunes des missions se transformaient, pour les survivants, en aventures individuelles, séparés brutalement par la flak ou la chasse ennemie. C’est dans ces histoires vraies, incroyables et inconnues du grand public qu’il a trouvé sa motivation pour constituer cette salle d‘exposition. En fait, il l’a dédiée inconsciemment, au courage de ces équipages soudés, qui dès leur arrivée dans les squadrons étaient informés qu’ils subiraient plus de 50 % de pertes. « Chaque homme a son histoire » : qu’il soit revenu indemne de ses missions, qu’il ait sauté d’un appareil en détresse, qu’il ait survécu à un crash, ait été fait prisonnier, fusillé ou erré seul à travers les lignes de front. Il aime en rapporter le témoignage à travers les innombrables documents et objets jaunis réunis dans cette salle.
La solidarité de ces gardiens de l’Histoire est parfois étonnante par son modernisme : ainsi Gilles a-t-il contacté le musée britannique de Groupe Lourds d’Elvington, expliquant pourquoi et comment il comptait entretenir la mémoire de ces anciens « squadrons »de la RAF, à équipages français, au sein du CAEA à Mérignac. En réponse, il reçut des équipements de l’époque et divers objets utilisés par les escadrilles d’Halifax. Tous ces apports se sont effectués sans jamais se voir, via…. internet ! Mieux, il a été fait membre honoraire à vie du musée d’Elvington et invité à venir enfin les rencontrer physiquement !
La salle Groupe Lourds « Guyenne et Tunisie » honore la mémoire des équipages, par la variété des objets, documents, maquettes et photos exposés.